Prendre soin avec cœur : être préposée aux bénéficiaires en cardio

Entretien avec Anick Lamontagne, préposée aux bénéficiaires à l'Institut de Cardiologie de Montréal

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Cet article est tiré de la quatrième édition du magazine de la Fondation

Après 17 ans en tant qu’auxiliaire à domicile en plus d’avoir œuvré en contexte de fin de vie et comme préposée aux bénéficiaires en CHSLD et CLSC, Anick Lamontagne n’aurait jamais pensé travailler dans un centre hospitalier. Pourtant, après presque cinq ans à l’Institut de Cardiologie de Montréal aux soins critiques, il est désormais impossible pour cette professionnelle d’expérience de s’imaginer ailleurs. « Une fois que tu as touché à la cardio, ça devient difficile de s’en éloigner… »

Des collègues généreux de leur savoir et de leur personne

« Travailler en cardiologie, du moins en soins critiques, je ne pense pas que ce soit pour tout le monde. Ici, il y a beaucoup de codes (arrêts cardiaques). Il ne faut pas avoir peur et être 100 % dédié. Cela dit, dès mon arrivée à l’Institut, le même sentiment de famille, le « tous ensemble » que j’ai perçu en entrevue s’est avéré vrai. Dans chaque unité, j’ai toujours reçu des réponses généreuses à mes questions. Je sentais qu’on voulait vraiment que je sois outillée et à l’aise dans mon travail. J’apprends depuis mon premier jour et chaque jour encore. Et c’est vrai pour tous les soignants; que ce soit des médecins, le personnel infirmier; mais surtout je pense à des collègues préposés qui ont vraiment été présents : Mireille Potvin, Carl Dion, Richard Rondeau et je pourrais continuer longtemps… », affirme Anick.

L’empathie comme moteur de guérison

Si le don de soi semble une force bien présente chez de nombreux professionnels du milieu de la santé, la proximité préposé-patient pendant les soins ne laisse aucun doute sur le rôle de l’empathie qui habite ces professionnels œuvrant parfois dans l’ombre. « Il faut aimer ça. Vraiment. Il faut savoir se mettre à la place de l’autre. Même si toi, tu n’as pas eu le thorax ouvert, il faut que tu puisses ressentir ce que ça peut faire. Il faut être à l’écoute du ressenti émotionnel. Est-ce que le patient a envie de parler de son anxiété, ou vaut-il mieux l’apaiser par une routine de soins en silence et offrir une ouverture si la situation change? Parfois, c’est le confort et la douceur du silence et rien d’autre. Et si on est personnellement plus fatigué, il y a toujours un collègue pour nous appuyer à travers les situations plus délicates », relate Anick.

Des petits gestes qui comptent beaucoup

Une des responsabilités des préposés s’articule autour de la reprise des activités quotidiennes (AVQ). Qu’il s’agisse de réapprendre à se mouvoir pour s’asseoir seul ou de se brosser les dents, chaque gain fait partie du processus de convalescence.

« Par exemple, une personne qui nous arrive des soins intensifs et qui ne s’est pas lavé les cheveux depuis une semaine… Avec cette personne, notre objectif est de lui redonner un semblant de vie normale. Pour la personne malade, ce n’est pas juste un lavage de cheveux, c’est un soin qui compte beaucoup. Les gens nous disent à quel point ça leur fait du bien, souvent avec émotion. Ensuite, notre rôle est de nommer l’évolution. On travaille très étroitement avec le personnel infirmier pour valider ce qu’il est possible de faire selon l’état du patient. Est-ce possible de marcher ensemble dans le corridor ou bien si l’immobilité est de mise? On les voit arriver amochés et on les voit, très souvent, prendre du mieux. J’aime faire remarquer à un patient qui, par exemple, n’arrivait pas à s’asseoir seul la semaine précédente qu’il fait du progrès. On est aussi là quand ils viennent nous revoir après leur convalescence. “Je te l’avais dit que tu allais marcher à nouveau!” C’est très valorisant et motivant d’encourager l’autonomie et de constater le rôle qu’on a pu jouer dans ça. », raconte Anick.

Prendre soin du corps physique tout en restant à l’écoute du cœur émotionnel

« Si, sur le plan physique, changer un sous-vêtement, laver un patient ou faire un changement de posture fait partie de notre quotidien, la valeur de notre travail est aussi profondément humaine. Tenir une main ou dire des mots qui rassurent au bon moment peuvent influer grandement l’état mental. Le personnel infirmier ou médical n’a parfois pas assez de temps avec les malades pour créer ces moments-là. En entrant dans une chambre, l’énergie qui est là, tu la ressens. Il faut savoir la décoder. Même à un patient intubé qui ne peut pas communiquer, je lui parle, je lui décris ce que je fais. Dans l’unité où je travaille, beaucoup de personnes sont dans une situation de grande vulnérabilité, ça demande une douceur de tous les instants. J’aime donner ce que j’aimerais recevoir, tout simplement. », ajoute-t-elle.

Un travail qui demande force physique et mentale

Comme les préposés sont toujours très près des patients, ils ne sont jamais loin quand leur état se détériore. « Quand il y a un code bleu, que tu pratiques un massage cardiaque et que ton regard croise celui du patient, c’est poignant. Il n’y a plus rien qui existe. Il m’est arrivé de pratiquer trois massages dans une même journée. On ne sait jamais ce qui nous attend. Je dois toujours être prête. Dans ces situations très critiques, c’est là que la synergie d’équipe prend tout son sens. On communique, on se relaye, on se complète parfaitement pour maximiser les chances de survie du malade. Il faut avoir le cœur solide », conclut-elle.

Le cœur d’Anick

Si le cœur d’Anick pouvait parler, voici ce qu’il nous dirait :

« Je suis reconnaissante quand un patient prend le temps de me regarder ou de prendre ma main, quand un patient dit mon nom en me remerciant. Gratitude fois mille! Ces moments confirment la raison pour laquelle je fais ce métier. »

 

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