D’entrée de jeu, lorsqu’on demande à Julie Richard de nous résumer la nature de son travail, les notions d’équilibre et de fluidité s’imposent. « Toute ma carrière est articulée autour de la recherche d’un équilibre entre les différents facteurs avec lesquels je dois conjuguer en tant que coordonnatrice du bloc opératoire, soient les ressources humaines et les ressources matérielles disponibles pour les chirurgies. Comme un balancier, je suis toujours en quête du juste milieu entre la nécessité de prendre soin des patients et celle de ne pas surmener nos équipes », illustre-t-elle.
Au quotidien, Julie Richard planifie et organise donc les chirurgies en déterminant les moyens qu’il faudra déployer pour les mener efficacement. Elle accompagne également toutes les équipes de spécialistes qui oeuvrent au bloc opératoire : perfusionnistes, inhalothérapeutes, personnel infirmier, préposés aux bénéficiaires, préposés de l’URDM et équipe de recherche en chirurgie-anesthésie.
Sur une base annuelle, la coordonnatrice est aussi responsable de la gestion de la liste opératoire. « Je m’occupe de bâtir le planning des chirurgies pour l’année à venir, en fonction des ressources et des besoins. Avec mon équipe de gestion de la liste préopératoire, nous tentons d’optimiser chaque plage horaire à l’aide de divers indicateurs et la collaboration essentielle du chef de département de la chirurgie. Par exemple, cette année, près de 2 000 interventions ont pu être planifiées. J’aimerais, dans les prochaines années, atteindre 2 500 chirurgies par année, un but que je me suis fixé avant la retraite, et ça doit passer par l’amélioration constante de la fluidité des soins qui sont prodigués », explique Mme Richard.
Vingt-quatre heures dans la peau d’une coordonnatrice de bloc opératoire, ça ressemble à quoi ? « Ça commence très tôt le matin… et ça se termine tard en soirée ! », affirme la femme d’action, tout sourire. « Dès 4 ou 5 heures du matin, je suis déjà en train d’organiser, de gérer les nouveaux messages pour m’assurer qu’on maximise les plages horaires pour la journée qui s’annonce. On veut pouvoir effectuer le plus de chirurgies possible et avoir à en annuler le moins possible. Ensuite, je me rends auprès des différentes équipes du bloc opératoire pour les accompagner dans leur travail », ajoute-t-elle.
Inhalothérapeute de formation, Julie Richard a ressenti le besoin, après 20 ans de pratique en bloc opératoire, de faire évoluer les méthodes de travail pour orchestrer un changement positif dans l’approche de soins. Depuis 9 ans, elle travaille donc à améliorer les systèmes qui sont développés au service du patient. « Je suis devenue gestionnaire parce que je trouvais qu’on ne mettait pas toujours le patient au centre de nos activités et de nos décisions. Je crois que lorsqu’il est au coeur de notre démarche, c’est là que nous prenons les décisions les plus judicieuses. On évite les étapes facultatives, le processus devient plus organique et efficient », explique-t-elle.
C’est à Julie Richard que l’on doit, entre autres, le projet AJC, qui privilégie l’arrivée du patient à l’hôpital le jour même de sa chirurgie. « Le patient n’a pas besoin de passer toute une nuit dans un lit d’hôpital la veille de sa chirurgie. Privilégier une admission le jour même permet d’augmenter la fluidité des soins. C’est un gain financier pour l’établissement et un gain sur les besoins humains. Tout ça a pour effet d’augmenter le nombre de personnes qu’on peut soigner tous les jours. »
Julie Richard a aussi participé à l’implantation du programme ERACS (Enhanced Recovery After Cardiac Surgery), qui vise à transformer le parcours du patient en milieu hospitalier. « Dans cette perspective, le patient devient partenaire de sa chirurgie, il se sent impliqué dans le processus. Il est mieux préparé, grâce à des classes virtuelles et des vidéos qu’on lui transmet avant sa chirurgie. On peut optimiser la convalescence d’un patient en le faisant marcher jusqu’à la salle d’opération par exemple. Il devient alors partie prenante de sa situation. En postopératoire, on le motive en visant avec lui des dates de sortie d’hôpital en le mobilisant pour conserver sa musculature et son énergie. Ce ne sont que des exemples ; la trajectoire de chacun bénéficie d’un accompagnement à toutes les étapes. C’est une tout autre approche qui passe par l’éducation, l’inclusion et la responsabilisation. »
Aux premières loges de toutes les activités que mène l’Institut de Cardiologie de Montréal au quotidien, Julie Richard peut témoigner de l’apport crucial de la Fondation et de ses donateurs. « La Fondation est une alliée très précieuse. Elle a la capacité d’aller chercher des fonds que le budget ministériel n’offre pas et qui sont essentiels aux soins de pointe que nous offrons. L’argent amassé permet non seulement l’accès à des technologies provenant d’autres pays, mais ils nous donnent aussi les moyens de développer de nouvelles façons de faire pour sauver des vies, » conclut-elle.
J’ai consacré une grande partie de ma carrière professionnelle à prendre soin des patients, mais aussi à veiller sur les gens qui les soignent. C’est une vie de don, de don de soi. Ça prend cette qualité pour faire ce que je fais. C’est une vie menée sous le signe de l’empathie.